mardi 21 février 2012

Et puis cette épiphanie?

Il est très commun chez les personnes qui quittent pour un long voyage en voilier de croire qu’un tel voyage est tellement extraordinaire qu’il changera qui nous sommes et notre vision du monde. Lors de notre retour nous n’auront plus à revenir à la vie insipide et mondaine que nous avions dans ce système de société débile qui nous est imposée de force et nous allons pouvoir, en tant que personnes super grandies et avec une perception renouvelée et renforcie du monde, attaquer de nouveaux défis auxquels nous avons jamais pensé auparavant. Si nous avons pu faire une chose si incroyable alors rien ne sera impossible pour nous. Certains autres gens ne savent pas où la vie les mènes et ont l’impression d’avoir un vide à l’intérieur et espèrent qu’un voyage de plusieurs années remplira ce gouffre. Et l’une des croyances les plus répandues est que dans notre société moderne nous avons oublié comment vivre et que les gens à l’autre bout du monde eux le savent encore. Les choses sont bien meilleures ailleurs et il nous faut y aller pour réapprendre à vivre. Nous avons fait la connaissance de centaines de bateaux durant notre voyage et tout le monde espérait en tirer quelque chose. Plusieurs allaient seulement naviguer dans les Caraïbes et revenir à la maison. Une famille, entre autre, s’est rendue jusqu’en Grenade et ont pris l’avions de retour au Canada. Ils ont réussi à écrire trois livres là-dessus! Notre arrivée en Méditerranée représentait pour environs dix de nos amis la fin de leur tour du monde et lorsque nous avons traversé l’Atlantique, nous l’avons fait aux cotés de dizaines d’autres bateaux complétant le même but. Faire le tour du monde à voile est définitivement quelque chose d’extraordinaire mais pas unique.





Alors, qu’est-ce que tout le monde en a retiré à la fin? Beaucoup de chose mais pas ce à quoi ils s’attendaient. Je ne suis pas psychologue alors je ne peux pas vous donner une réponse exacte et complète à cette question mais je peux quand même vous décrire ce que nous avons observé chez les équipages des autres bateaux qui ont croisé notre sillage. Ceux qui voulaient trouver un sens à leur vie sont revenus aussi vides que lorsqu’ils sont partis. Les gens qui avaient des problèmes intérieurs n’ont fait que transporter leurs problèmes avec eux autour du monde et les avaient toujours à leur retour. Et ceux qui étaient mêlés dans leur tête sont revenus aussi mêlés mais avec moins d’argent dans leurs poches. Les gens à l’autre bout du monde ne sont pas meilleurs, ou pire en l’occurrence, ils vivent simplement certains aspects de leur vie de façon différente de la notre. Certaines de leur valeurs sont meilleurs et d’autre sont pire que les nôtres. Personne n’a la réponse parfaite à la vie, l’amour et tout. À mon avis, je préfère de beaucoup le niveau de vie que nous avons au Canada à n’importe quel autre que nous avons vu dans ce voyage. En d’autre mots, si vous n’êtes pas heureux ou bien ne savez pas comment les choses fonctionnent dans votre tête alors la réponse se trouve juste là où vous êtes et vous n’avez pas à allé voir comment le reste du monde est aussi perdu que vous pour la trouver. Pour ma part, je pense qu’il n’y a rien à apprendre sur vous-même dans un voyage autour du monde que vous ne pouvez pas trouver facilement lors de vos méditations quotidiennes dans votre voiture lors de votre trajet au travail. Un voyage autour du monde c’est de vivre une aventure extraordinaire dans des endroits très différents de ce que l’on connait. Goûter à des pizzas aux quatre coins du monde ou de déguster des bières locales dans chaque pays que l’on visite. Faire l’amour à sa femme ou à son mari dans 50 pays différents et au dessus de trois océans (essayez de battre ça ma bande de moumounes) et simplement d’avoir la persévérance de continuer, d’avancer de l’avant sans se décourager par les bris constants du bateau ou bien des escroqueries de la part de chaque personne avec qui on fait affaire. Un tour du monde c’est de voire des paysages et des villes d’une beauté éblouissante et de sortir d’un bus, de mettre les deux pieds sur un salar en Bolivie entouré de 50 km de sel et de dire; Wow, c’est du sel en titi ça! C’est de mouiller l’ancre à Allen Cay dans les Bahamas et de rester bouche bée devant la beauté de l’eau turquoise et des îles de sable environnantes. C’est de regarder dans la Mer Rouge, d’y voir le fond et de réaliser qu’il y a 50 pieds (17m) d’eau en dessous de la coque!

‘’Dans ce voyage, nos yeux on été tellement brûlés par les beautés extraordinaires du monde que nous sommes maintenant aveugle de ses laideurs’’

Mais si nous ne trouvons pas les réponses à nos questions est-ce que cela veut dire que nous n’avons pas changé? Bien sûr que non. Nous avons, tous et chacun, subit des changements sur différents aspects. Pour commencer, nous sommes maintenant excellents en géographie. Si quelqu’un nous demande au sujet de Port Vila nous ne savons pas seulement qu’il s’agit de la capitale du Vanuatu mais nous avons également une image très vivide de ses rues et de son marché central mais aussi des festivités du 30ième anniversaire auxquelles nous avons assisté lors de notre passage. Cette situation c’est actuellement présenté alors que nous étions au Maroc. Nous savons que les gens dans les Caraïbes sont racistes, que la nourriture en Thaïlande est excellente, que l’on ne doit jamais faire confiance à un Égyptien et que les Péruviens sont très gentils et accueillants. Nous avons appris à dire ‘NON’ d’une manière ferme mais polie. Notre regard sur les cultures est grandement modifié et a évoluée significativement et nous avons une bien meilleure idée du pourquoi les choses dans notre monde sont comme elles sont. Mais toutes ces connaissances et cette sagesse ne sont pas des attributs qui changent fondamentalement une personne. Nous sommes peut-être plus connaissant mais pas plus intelligents. Les gens qui étaient idiots avant de quitter le quai sont maintenant des idiots plus connaissant et ceux qui étaient mêlés dans leur tête sont toujours mêlés mais ils savent maintenant dans quel monde ils essaient de trouver un sens à leur vie. Il y a une chose par contre que nous avons observé dans presque 100% des couples de navigateurs que nous avons rencontré et il s’agit de la solidité du lien qui existe entre les deux partenaires. Nous avons très rarement vu des gens si près l’un de l’autre et liés si étroitement dans leur vie. À défaut d’autre choses, lors d’une circumnavigation on apprend à vivre avec son/sa partenaire.

Finalement, qu’est-ce qui arrive après le voyage? Encore une fois, je ne peux pas dire précisément ce que nous allons faire après le voyage mais tous les gens que nous avons connus et qui sont retournés à une vie avec revenue sont retourné à leur métier d’origine. Les enseignants enseignent, les pêcheurs pêchent, les policiers policent et les ingénieurs font de l’ingénierie. Comment ce fait-il qu’ils n’ont pas fini avec une nouvelle vie? La réponse est en fait assez simple. Notre société est bâtie sur un cadre et une structure qui ont évolués depuis très longtemps et est maintenant très résiliente et en grande partie extrêmement difficile à contourner. Lors que nous sommes partis pour faire le tour du monde, nous avons dû nous déconnecter, à tout le moins en partie, de ce système et ce fut assez difficile à faire. C’est incroyable combien de racines nous avons d’enfouies dans le système sans que nous le sachions. Ce système est le seul dans lequel nous puissions faire de l’argent et conséquemment nous devons réintégrer le système, reconnecter nos signaux d’entrée/sortie dans la machine et retourner à cette réalité virtuelle dans laquelle nous vivons tous. (si vous ne comprenez pas cette dernière phrase vous devez écouter le film ‘’La matrice’’). Il existe quelques façons d’éviter de faire cela à tout le moins partiellement. Il suffit de déclencher une révolution planétaire qui changera à jamais le style de vie de notre société où bien nous pouvons continuer à naviguer en minimisant les contacts avec la race humaine. C’est deux options ne sont malheureusement pas très lucratives et à moins que quelqu’un découvre une façon de vivre sur cette planète sans argent alors la seule solution est de réintégrer la dictature sociale de nos sociétés. Avec cela à l’esprit, la question devient maintenant qu’est-ce que l’on fait après? Est-ce que nous retournons dans nos emplois précédents et allons travailler emmurés entre quatre paravents en tapis et se taper la politique de bureau ou bien allons nous faire quelque chose de complètement nouveau? Cette question devrait être assez facile à répondre après que nous ayons complètement changé nos vies en partant faire un tour du monde mais elle devient très différente une fois que l’on commence à faire le calcul des revenus possibles. Pour chacun de nous, le choix de notre profession que nous avons fait dans le passé l’a été fait pour une très bonne raison; c’est le domaine dans lequel nous étions bons et la réalité est que nous sommes toujours excellents dans ces professions. Cela veut dire que notre métier antérieur est le champ dans lequel nous pouvons faire le maximum d’argent et dans lequel nous ferons le meilleur travail. Bien sur, avec la vision globale que nous avons maintenant nous pourrions partir une espèce de compagnie en commerce ou de service international mais il est très peu probable que ferions plus d’argent que dans nos métiers antérieurs. De plus, à moins que quelqu’un veuille faire le commerce des armes ou bien des épices les options de travail international sont assez limitées tout spécialement rendu à notre âge. Ainsi, pour toutes ces raisons, la plupart des gens retournent à leur vie antérieure mais enrichis de l’unes des aventures les plus incroyable qu’il est possible de faire dans notre monde moderne : nous avons fait le tour du monde en voilier et cet exploit restera avec nous pour le reste de notre vie.