vendredi 9 avril 2010

Dans le milieu de l'océan Pacifique.

Danielle a trouvé le moyen de publier des articles sur notre blog en utilisant la radio SSB alors je suis capable de vous écrire un petit mot sur notre passage du Pacifique mais malheureusement pas de photos. Alors que j'écris ces lignes, nous naviguons depuis plus de 14 jours, avons traversé environs 1900 nm (3535 km) depuis les Galapagos et il nous reste encore tout près de 1100 nm (2045 km) avant d'arriver aux îles Marquise dans les Polynésiennes Françaises. Comment est-ce ici? Pour tout dire, il n'y presque rien ici et je veux vraiment dire RIEN. En fait, il n'y tellement rien ici que vous n'avez pas idée de ce qu'est le néant avant d'être venu ici. Aucun bateau, aucun avion ou d'un bout de terre, juste de l'eau des vagues, le ciel et les nuages. Ils devraient mettre une pancarte flottante avec écrit dessus ''Ici c'est nulle part et vous y êtes au beau milieu!'' Nous n'avons pas vu ou parlé à un autre être humain depuis plus de 14 jours maintenant. Pensez-y une seconde et essayez de vous rappeler quelle est la plus longue période de temps pendant laquelle vous n'avez pas interagi avec une autre personne autre que votre conjoint?
Alors que faisons-nous? Enfin pas grand-chose puisque le mouvement continu des vagues nous empêche de faire quoique ce soit de plus compliqué que de lire et, avec un effort monstre, de cuisiner. En fait, nous devions sérieusement faire une vidéo de l'une de nos séances de cuisine. Essayez de faire cuire un steak avec des légumes et des patates pilées pendant que votre cuisine se balance de gauche à droite sans arrêts. Nous devons nous appuyer sur le comptoir avec les jambes écartées et tenir toutes les choses d'une main et de manipuler les ingrédients de l'autre. Puis il faut aller chercher le lait dans le réfrigérateur. Oh nooooonnnnn! Marchant les jambes écartées comme un lutteur sumo nous avançons péniblement vers le réfrigérateur en nous tenant sur la table de navigation en priant que, pendant que nous sommes éloignés du comptoir de cuisine, une vague plus grosse que les autres n'arrive pas et jette tout les plats par terre. Finalement, nous avons le pot de lait et retournons rapidement vers le comptoir mais cette fois on est un peu plus rusés. On attend le moment précis pendant la vague pour partir alors que la gravité nous pousse vers le comptoir. Et hop, en deux pas on est de retour maintenant comment qu'on fait pour mesurer une tasse de lait avec une seule main? Je crois que vous voyez le topo ici. Lorsque nous ne faisons pas d'acrobaties avec la nourriture et les chaudrons, nous passons la majeure partie de notre temps à lire. Lors de nos deux premières nuits en mer, nous faisions tout à la lettre et alternions nos quarts toute la nuit. Mais faire des quarts c'est fatiguant et puisqu'il n'y a tout simplement rien ici à part nous, il n'y avait rien d'autre à faire que de s'assurer que le bateau se comporte bien et d'ajuster les voiles lorsque le vent tourne. Mais étant dans l'océan Pacifique en dehors de la saison des ouragans, nous sommes au beau milieu des Alizés et au mieux nous devons ajuster les voiles une fois à tout les 12 heures! Alors la troisième nuit nous avons commencé à faire des petits sommes durant nos quarts dans le cockpit puis à la quatrième nuit on s'est dit ''Ah pis tant pis!'' Nous avons alors commis le péché le plus réprimandable pour des marins et avons été nous coucher tous les deux pour la nuit! Mais là pour notre défense, je veux mentionner que nous couchons sur la banquette de la cabine autour de la table où nous pouvons facilement entendre ce qui se passe avec le bateau et se lever rapidement si quelque chose de grave arrive. De plus, nous avons les affichages des instruments de navigations à l'intérieure de la cabine et nous pouvons y jeter un coup d'oil une fois de temps en temps. Au moins comme ça on a un peu de sommeil décent.
J'exagère peut être un peu lorsque je dis qu'il n'y traitement rien ici puisqu'il y a en fait un peu de vie sauvage autour de nous. À deux reprises, nous avons vu des dauphins nager dans nos environs et aussi incroyable que ça puisse paraître, alors que nous sommes à des milliers de miles du plus proche bout de terre, il y a beaucoup d'oiseaux ici et là. L'un d'eux a même passé deux ou trois jours avec nous en se perchant sur la rambarde durant la nuit et en allant pêcher une ou deux fois durant le jour. Presque tous les jours, je fais le tour du bateau afin de vérifier que tous les cordages et les gréements sont en bon état et durant ma ronde je jette habituellement par-dessus bord quatre ou cinq poissons volants ou des calmars venus prendre un bain de soleil sur notre pont. Mais à part cela, c'est le soleil, les nuages et la mer!